France Info / France 3 (Auvergne)| Article de Jean-Christophe Pain
Pollution de l'Air | A la fin de l'enquête publique pour le prochain Plan de Protection de l'Atmosphère, le collectif d'habitants Coll'Air Pur dénonce un "cocktail polluant" dans la vallée de l'Arve. Une récente étude atteste de concentrations préoccupantes de substances cancérogènes et perturbateurs endocriniens.
L'enquête publique pour le PPA2, le prochain Plan de Protection de l'Atmosphère dans la vallée de l'Arve en Haute-Savoie, vient tout juste de se terminer.
L'association citoyenne Inspire a dressé le bilan -négatif- du premier PPA.
Et les habitants regroupés dans le collectif Coll'Air Pur n'ont jamais été aussi inquiets. Après les particules fines qu'on inhale, voici venir des polluants qu'on ingère. Après les camions, l'incinérateur.
A travers le centre scientifique indépendant Analytika, ils dénoncent : "les dispositions relatives à la surveillance de l'impact environnemental prévues par l'arrêté préfectoral du 26 mai 2014 autorisant l'exploitation de l'incinérateur, implanté à Passy au pied du Mont-Blanc et au fond d'une vallée encaissée, ne sont pas respectées par l'opérateur".
C'est pour cette raison que le collectif a missionné le laboratoire spécialisé Micropolluants Technologies.
Objectif : procéder au dosage des dioxines et furanes éventuellement présentes dans deux échantillons de "poussières noires" collectées sur la commune de Passy, au cimetière communal, et dans la zone des Egratz.
Basta Mag | Article de Élodie Horn
Environnement | Depuis des années, les habitants de la vallée de l’Arve, située au cœur de la Haute-Savoie, tentent vainement d’alerter les pouvoirs publics sur la mauvaise qualité de l’air qu’ils respirent tous les jours.
En cause : un incinérateur, l’industrie, et, surtout, la circulation. Les pics de pollution y durent parfois même plus longtemps qu’à Paris. Organisés en collectif depuis le début de l’année, les habitants ont décidé de poursuivre l’État en justice. Leur dernier recours pour espérer enfin pouvoir respirer sans mettre à mal leur santé.
C’est le début de l’été, le soleil sublime la vallée de l’Arve. Située au cœur de la Haute-Savoie, dans un cadre idyllique, elle côtoie les hauts lieux du tourisme de montagne, un secteur qui génère pas moins de 50 000 emplois dans les Alpes. « Notre vallée a un situation particulière où d’un côté il y a Saint-Gervais, le Val Bourgeois, juste en face de la prestigieuse Megève. À 20 kilomètres par la route, il y a aussi Chamonix, capitale mondiale de l’alpinisme. Quant à la frontière suisse, elle n’est qu’à une petite heure », décrit Eric Solvas, assis à la terrasse d’un café qui fait face à ces montagnes qu’il connaît par cœur. Voilà pour le volet touristique. Mais derrière, il y a aussi le « fond de vallée », qui est selon Eric Solvas, « un dépotoir ».
L’homme habite Passy, une des principales villes de la partie basse de la vallée. Dans un environnement du tout tourisme, la vallée, qui porte le nom de la rivière qui la traverse avant de se jeter dans le Rhône, se distingue par une tradition plus ouvrière. « C’est ici qu’a été installé un incinérateur, en 1995, pour brûler les déchets ménagers des 150 000 habitants de la vallée. Il n’a pas été installé à Megève ou à Chamonix, qui sont dans la partie haute de la vallée. Comme si l’on considérait que nous étions des habitants de seconde zone, qui peuvent être pollués », ajoute Eric Solvas. Ce retraité est engagé dans l’Association pour la qualité de vie à Passy.
Celle-ci dénonce notamment un recours excessif à l’incinération dans la vallée, avec un tri sélectif quasi-inexistant. À proximité de l’incinérateur se dresse aussi une usine, SGL Carbon, spécialisée dans la fabrication de pièces en carbone et graphite, et qui recrache d’importants taux de poussières ainsi que du H2S, composant qui sent l’œuf pourri [1]. La vallée est aussi traversée par une importante circulation. Tous les jours, 3200 camions y transitent vers l’Italie et s’arrêtent à Passy afin de réaliser un contrôle obligatoire de sécurité avant de passer le tunnel du Mont Blanc. Le redémarrage des moteurs fait, à chaque fois, grimper les niveaux de pollution.
France Bleu (Pays de Savoie)| Reportage de Anne Chauvet & Laurent Pascal
Retranscription audio | On connaît les problèmes de pollution de l'air en Vallée de l'Arve. Y a-t-il des répercussions sur les fruits et les légumes ? C'est la question que se
pose le collectif Coll'Air Pur qui a financé une étude pour savoir à quoi s'en tenir. Un laboratoire a donc analysé des champignons dit "trompettes-de-la-mort", ramassés vers Passy.
Et pour Richard Vivion, les résultats ne sont pas bons.
Dans ses conclusions, le laboratoire Analytika parle d'une très forte teneur cumulée en métaux lourds (9 éléments différents) qui a été découverte dans les 60g de "trompettes-de-la-mort" analysés.
Bernard Tailliez est le directeur de ce laboratoire : "On trouve à peu près 500mg/kg du cumul de ce qu'il est convenu d'appeler les métaux lourds, par exemple le Zinc dont on trouve une teneur 5
fois plus élevée. À ma connaissance les trompettes-de-la-mort naturellement ne doivent pas contenir de Plomb. Ici les trompettes-de-la-mort à Passy en contiennent".
Les champignons ont été ramassés en 2016 dans le secteur de Passy à un peu plus de 2km de l'incinérateur. Celui-ci pourrait donc être l'une des sources de contamination avec aussi le trafic
routier, estime le directeur du laboratoire Analytika.
Pour Muriel Auprince, membre du collectif citoyen Coll'Air Pur qui a financé la recherche, ces résultats sont en tout cas inquiétants : " C'est inquiétant parce que dans la vallée
beaucoup de gens font leur jardin, moi la première, sachant que les champignons recueillent des métaux lourds, je me dis que je vais arrêter un petit peu de nous intoxiquer, d'intoxiquer tout le
monde".
Et pour le collectif Coll'Air Pur, ces analyses doivent à nouveau servir de signal d'alarme.
Un collectif qui souhaite désormais qu'un établissement public comme l'INERIS (Institut Nationale de l'Environnement et des Risques Industriels), mène lui aussi ses propres analyses.
Le Dauphiné Libéré (Haute-Savoie)| Article d'Amélie Daviet
Pays du Mont-Blanc| Quand les trompettes-de-la-mort montrent des traces de pollution, le Coll’air pur s’inquiète. Enfin… continue à s’inquiéter. Le collectif de lutte contre la pollution de la vallée de l’Arve a en effet envoyé au laboratoire Analytika 60 grammes de champignons séchés, ramassés en 2016, sur les hauteurs de Chedde, à une distance de 2,5 km à vol d’oiseau de la zone industrielle des Egratz.
Cette nouvelle collaboration (*) entre le Coll’air pur et le laboratoire d’analyses indépendant, dirigé par Bernard Tailliez, permet de mettre en évidence la présence de contaminants chimiques inorganiques, en particulier neuf métaux lourds, dans les trompettes-de-la-mort.
Et, après comparaison avec les teneurs de référence disponibles pour ce type de champignons, Bernard Tailliez confirme que « seul un transfert par voie aérienne des contaminants récemment découverts dans les poussières aéroportées de la ZAE des Egratz peut expliquer la présence des contaminants chimiques inorganiques découverts dans [cet] échantillon ».
Cobalt, chrome, nickel, arsenic, plomb, cuivre sont autant de contaminants trouvés dans les trompettes. Mais c’est surtout le zinc qui interpelle le professeur, du fait de sa « très forte teneur cumulée ».
Le Coll’air pur demande désormais une intervention de l’Ineris pour confirmer ou infirmer les études d’Analytika. Ce qui tombe bien puisque le préfet de Haute-Savoie, Pierre Lambert, avait annoncé vouloir faire appel à l’Institut national de l’environnement industriel et des risques pour que « les scientifiques et les sachants se prononcent » quant aux analyses de Bernard Tailliez.
(*) Deux batteries d’analyses de poussières ont montré, entre autres, de fortes teneurs en métaux lourds, la présence de cancérigènes, de mutagènes, de reprotoxiques et de perturbateurs endocriniens.
BoxSons | Reportage de Thibaut Mougin
La vallée de l’Arve en Haute-Savoie, aux confins de la Suisse et de l’Italie est l’une des contrées les plus polluées de France. En lanceurs d’alerte, médecins et habitants bataillent au quotidien contre un air hivernal vicié devenu au fil du temps meurtrier.
Brouillard montagnard inoffensif ou nuage de pollution? Pour des touristes venus skier dans la vallée de Chamonix, il est souvent difficile de faire la différence. Pour les 150 000 habitants de cette vallée, entre France, Suisse et Italie, la radiographie est plus rapide, tant ils sont habitués depuis des décennies à respirer un air de mauvaise qualité. En janvier 2017, l’extrême est du département de la Haute-Savoie a connu un épisode de pic de pollution de plus de 30 jours.
Cette vallée semi-rurale, semi-urbaine combine plusieurs sources de pollution. Avec le trafic routier tout d’abord : plus de 500 000 camions empruntent chaque année la route pour rallier l’Italie et le val d’Aoste via le tunnel du Mont-Blanc. A Passy, dans la plaine, l’usine SGL Carbon brûle quotidiennement des déchets. En hiver, les cheminées des particuliers sont encore utilisées pour le chauffage. Transports, industrie, chauffage… un cocktail explosif de contaminants pour une vallée resserrée : avec le froid et le soleil, les particules figées sont emprisonnées, sous cloche, comme dans une immense marmite.
D’après une étude de Santé publique France, l’exposition aux particules fines provoque la mort anticipée de 85 personnes par an dans cette vallée alpine. Un résultat d’enquête qui n’a pas surpris le corps médical haut-savoyard, à l’image de Frédéric Champly, un urgentiste des hôpitaux du Mont-Blanc qui sur France 2 dès 2015 parle déjà d’un « air mortel » :
« La santé publique n’intéresse pas les politiques à quelque niveau que ce soit. Agir sur la qualité de l’air, c’est taper sur l’industrie, sur le transport, sur les ménages… c’est aller à la confrontation. Nos élus n’ont plus les moyens d’entrer en confrontation. » Frédéric Champly, médecin urgentiste et lanceur d’alerte.
Lassé par l’inaction collective, le médecin se lance dans la course aux législatives en 2017 pour briguer la sixième circonscription de Haute-Savoie avec une envie de jouer au chamboule-tout. Il ne parvient pas à se qualifier pour le second tour mais réalise un score honorable avec plus de 13 % des suffrages. Le retour d’expérience politique est simple : certains responsables politiques en sont encore au stade du déni écologique.
« On re-placarde dans les métros parisiens les pubs de Saint-Gervais… L’air est y irrespirable. Le slogan c’est l’air pur au pays du Mont-Blanc » Frédéric Champly, médecin urgentiste et lanceur d’alerte.
Le Dauphiné Libéré (Haute-Savoie)| Article d'Amélie Daviet
Passy | Hier, le préfet visitait l’usine de Chedde et rappelait les 4 millions d’euros investis dans la réduction des émissions de l’usine.
Le préfet l’a martelé, hier, on ne peut pas le taxer d’inactivité. « On refait le PPA et en même temps on agit sur de nombreux plans. Nous n’avons pas attendu la publication d’analyses ou les dépôts de plaintes », revendique Pierre Lambert. Toujours est-il pourtant que son activité de ces derniers jours, avec une prise de parole vendredi sous forme de réponse aux inquiétudes diverses et une visite de l’usine SGL Carbon, hier, découle du soudain coup de projecteur sur la pollution dans la vallée de l’Arve (lire nos éditions précédentes).
« On fait de mauvais procès à la vallée de l’Arve »
Le représentant de l’État avait convié sénateurs, députés et autres élus locaux à cette visite de l’usine de Chedde (Passy) « à l’origine de 12 ou 13 % de la pollution industrielle dans la vallée », énonce-t-il. Il a tenu à rappeler que « l’industrie est une chance », citant les 55.000 emplois qui y sont liés dans la vallée de l’Arve. « On fait de mauvais procès à une vallée dont la valeur internationale en matière d’industrie est reconnue. Et cela n’empêche pas les touristes de venir », continue--til, justifiant par là que « ce n’est pas la vallée de la mort ».
Épaulé par Anne-Laure Jorsin-Chazeau, et Yannick Mathieu, directrice départementale et directeur adjoint à la Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Dreal), Pierre Lambert a présenté « un plan ambitieux d’investissement » pour l’usine cheddoise habituée des doléances locales. Un plan qui s’inscrit dans la démarche non moins « ambitieuse, concertée et partenariale » du PPA2*.
Car la filiale de fond de vallée du groupe SGL Carbon (lire son historique par ailleurs) a investi 4 millions d’euros cette année pour se mettre au vert, aidée en cela à hauteur de 1,2M€ dont un million assuré par le conseil régional.