Qualité de l'air dans la vallée de l'Arve : Une nouvelle batterie d’analyses pour aller plus loin

Le Dauphiné Libéré (Haute-Savoie)| Article d'Amélie Daviet

Pollution de l'Air | Le 14 janvier dernier, Le Dauphiné Libéré publiait dans l’édition Mont-Blanc les résultats des premières analyses effectuées par le laboratoire d’analyses indépendant Analytika, à la demande du tout jeune Coll’air pur. Au menu de cette première plâtrée de résultats, on trouvait des métaux lourds. Zinc, plomb, arsenic et bien d’autres. De quoi faire réagir dans la vallée.

 

De l’eau, plus ou moins polluée, a depuis coulé sous les ponts et cette nouvelle ventrée de chiffres, chromatogrammes, spectromètres trouve la vallée à la sortie d’un hiver pas si pollué que ça. Intempéries obligent. Mais alors pourquoi réaliser de nouvelles analyses ? Et qu’apportent-elles de nouveau ?

 

Une nouvelle méthodologie

 

« Deux raisons à cela », répond Bernard Tailliez, Géotrouvetout de la pollution, qui tient les rênes du laboratoire. Tout d’abord, la méthodologie, affirme le scientifique. « J’ai voulu répondre à la mauvaise foi de mes opposants qui affirmaient que puisque les premières poussières analysées avaient été prélevées au sol, elles montraient la teneur en métaux lourds du sol. Et non de l’air. » Les poussières qu’il a analysées cette fois-ci ont donc été prélevées sur un appui de fenêtre situé à une cinquantaine de mètres de là où avaient été effectués les premiers prélèvements.

 

« C’est une fenêtre qui n’a jamais été nettoyée et qui montre donc le cumul historique », justifie Bernard Tailliez. Le bâtiment concerné se trouve dans la zone industriel le des Egratz, à proximité directe d’une zone résidentielle (ainsi que d’une crèche et d’une école primaire).

 

Et puis, ces nouvelles analyses vont plus loin. Alors que seuls les composés inorganiques avaient été observés, les contaminants organiques ont cette fois été pris en compte (pour ceux qui auraient raté leurs cours de chimie lire en fin d’article) (2). « La quantité de poussière que j’avais lors des premières analyses n’était pas suffisante pour que je puisse tout faire », affirme le directeur d’Analytika. La méthodologie a donc été adaptée et les analyses poussées un peu plus loin. « En termes de métaux lourds, c’est du même ordre que les analyses précédentes », confirme Bernard Tailliez qui espère simplement que l’on « tirera la sonnette d’alarme. »

 

(2) On trouve en chimie trois grands domaines. La biologie qui concerne les êtres vivants et qui ne nous intéresse pas ici. La chimie inorganique, qui touche aux minéraux et donc, notamment, aux métaux lourds. Et la chimie organique qui est la chimie du carbone, tout ce qui résulte de la combustion de produits contenant du charbon, du pétrole.

« Le cancer c’est comme faire ses courses au supermarché »

 

Les perturbateurs endocriniens, cela fait un moment, maintenant, que l’on en entend parler. Chacun y va de son avis. On les brandit comme autant de menaces latentes et destructrices. Mais qui sont-ils vraiment et quels sont leurs effets ?

 

Le terme perturbateur endocrinien est apparu il y a un peu plus de 25 ans pour décrire tout ce qui perturbe l’hormone. « Il y a beaucoup de produits toxiques qui peuvent être des perturbateurs endocriniens », établit Ludivine Ferrer, directrice de l’association santé environnement France (Asef). En fait, un contaminant peut tout à fait être à la fois un mutagène (lire ci-contre) et un perturbateur endocrinien.

 

Le problème ici est que « le seul cancer dont on est sûr qu’il est lié à un toxique, c’est celui de l’amiante car il déclenche une forme de cancer bien spécifique. Pour le reste, c’est très compliqué », affirme Ludivine Ferrer. En effet, on parle ici de pathologies multifactorielles. C’est-à-dire qu’on ne peut pas attribuer un cancer à tel ou tel contaminant. C’est une accumulation.

 

Baisses de QI et spermatozoïdes en berne

 

« On a tous un ami qui nous dit qu’il connaît quelqu’un qui fume (1) depuis 50 ans et qui se porte comme un charme. Mais le cancer, c’est un peu comme de faire ses courses au supermarché. On part avec un chariot et celui-ci est plus ou moins plein à la base. C’est notre génétique. Et puis on le remplit de cancérigènes et autres couches plus ou moins néfastes et lorsque le chariot est plein, notre corps déclare une maladie. » Une part de chance, donc, et puis une part d’acquis.

 

En termes d’effets sur la santé, la liste est longue mais surtout hasardeuse. Ludivine Ferrer évoque la diminution du QI des bébés nés de mères exposées à certains perturbateurs endocriniens. « Lorsque l’on a un projet d’enfant, il faut commencer par se dépolluer », affirme-t-elle.

 

« Comment définit-on l’infertilité », interroge quant à lui Richard Faitg, anesthésiste à Thonon-les-Bains et membre de l’Asef. Peu voire pas d’études sont disponibles sur le sujet, entre autres pour des raisons d’éthiques. Pour autant, « des spermatozoïdes, il y en a de moins en moins et on ne sait pas pourquoi », poursuit Richard Faitg. « Les effets de l’environnement vont nous arriver dessus très très vite », conclu-t-il.


(1) Le tabac contient des mutagènes et des perturbateurs endocriniens.

Écrire commentaire

Commentaires: 0