Var Matin | Article de Véronique Georges
Environnement. L'arbre, situé sur le domaine public mais intégré dans le périmètre de la terrasse occupée par « Le Wafou », est mort, victime d'un acte de malveillance.
Var-matin s'est fait l'écho, dans son édition du 23 juillet 2010, du dépérissement aussi brutal qu'inquiétant d'un magnifique platane situé sur le domaine public mais à l'intérieur du périmètre occupé par la terrasse du bar-brasserie « Le Wafou ». Presque du jour au lendemain, le feuillage a changé de couleur, laissant présager le pire.
Alertés par les mêmes symptômes, les jardiniers de la ville l'avaient examiné dès le 2 juillet. Ils n'étaient pas au bout de leurs surprises : « On pensait au départ à une attaque fulgurante d'un champignon », explique Gilles Garin, responsable du service de l'environnement, loin d'imaginer un sabotage.
Un produit toxique injecté dans le tronc
En fait, ils ont découvert à la base du tronc un trou d'une dizaine de centimètres de profondeur, probablement réalisé à l'aide d'une perceuse, d'où suintait un liquide jaunâtre qui a été prélevé aux fins d'analyse.
Yvan Gindre, agent de l'Office national des forêts, expert en arboriculture et auteur d'une inspection de tous les arbres de la commune en 2009, a été sollicité pour confirmer. Sur place, son œil avisé a aussi décelé cinq autres trous identiques dans la partie basse du tronc, masqués par des morceaux d'écorce recollés ! Soit six orifices en tout, bouchés avec du mastic vert que l'on trouve dans les jardineries, et maquillés. Du travail d'artiste !
« La personne qui a fait ça avait l'intention de l'éliminer sciemment et délibérément et de faire passer sa mort pour naturelle. Mais cela n'a pas échappé à l'expert », souligne M. Garin.
Une perte inestimable
Le policier municipal dédié à l'environnement a fait des photographies et un constat. Le rapport du technicien de l'ONF est attendu dans les jours à venir, tout comme les résultats de l'échantillon du produit suspect, envoyé au laboratoire Analytika de Cuers. D'après Yvan Gindre, il s'agirait d'un puissant phyto-toxique qui a empoisonné le platane.
Prudent, le maire attend les conclusions définitives pour saisir la justice. Mais sa décision est déjà prise. Aussitôt le rapport d'analyses rendu officiel, la commune déposera plainte à la gendarmerie pour cette dégradation volontaire du patrimoine maximois.
Ce vieux platane faisait en effet partie des sujets remarquables du patrimoine communal, comme ceux de la rue Jean-Jaurès ou de la place Jean-Mermoz. Il donnait du cachet, avec d'autres, à la place Victor-Hugo. « On est impuissant. Il est mort et c'est sans retour. Il était sain, il avait de longues années de vie devant lui », souligne le responsable du service, écœuré par cette perte inestimable.
Un remplacement couteux
Le préjudice financier, entre sa valeur patrimoniale, son abattage, le carottage, le terrassement, la fosse pour accueillir son remplaçant... est estimé à au moins 30 000 euros. « On est dans un milieu urbain, il faudra faire des travaux, il y aura peut-être des réseaux à déplacer », précise-t-il. Il préconise son remplacement par une variété « à longue durée de vie, une souche de platane résistant aux maladies ou un micocoulier. »
Le maire, Vincent Morisse, est affligé : « J'espère que les criminels qui ont commis cet empoisonnement seront retrouvés et punis. En tout état de cause, cet acte malveillant ne profitera à personne car un autre arbre sera replanté au même endroit et l'emprise sur le domaine public de la terrasse de l'établissement concerné sera réduite pour garantir le bon développement du futur sujet. »
Mais « même en replantant, on n'aura jamais un aussi bel arbre », regrette Gilles Garin. Les Maximois, qui depuis quelques jours ont eu vent de cet empoisonnement, sont scandalisés.
Consternation au Wafou
Brice Tirabassi, directeur du Wafou, est consterné par la rumeur. Des mauvaises langues laissent entendre que son établissement trouverait un avantage à la mort du platane. De là à le soupçonner, il y a un pas, franchi par certains. Il s’est entretenu avec le maire sur le sujet. « Depuis vingt-deux ans, ce platane ne nous a jamais gênés, dit-il. Au contraire, il nous procure de l’ombre. » « Aujourd’hui, il perd ses feuilles mortes, qui tombent sur la terrasse, ce dont on se serait bien passé. On entretient la terrasse de la même façon depuis toujours. Nous-mêmes hors saison, et par une entreprise durant l’été. »
M. Tirabassi rappelle que son équipe a travaillé dans des conditions difficiles au mois de juin. « On a subi les gens du voyage, des bagarres, des verres cassés, des insultes et des menaces, des lacérations de bâches. » Il espère « que les caméras de la ville pourront montrer quelque chose ». C’est peu probable, les faits ayant été commis presque à ras du sol, au milieu des chaises et tables qui restent en place même la nuit.
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